L’article 238 A du CGI est une pierre angulaire contre l’évasion fiscale internationale. Il cible les transactions avec des États à fiscalité privilégiée, impactant la déductibilité des charges et activant d’autres mesures anti-abus. Notre article explore sa complexité, de la définition du régime privilégié à la gestion de la preuve.
La théorie de l’acte anormal de gestion n’est pas le seul outil dont dispose l’administration fiscale pour contrôler la politique de dépenses des entreprises. En matière de fiscalité internationale, un dispositif bien plus spécifique et redoutable existe : l’article 238 A du Code général des impôts (CGI).
Cette disposition est la pierre angulaire de l’arsenal anti-évasion fiscale français, visant à décourager les transactions avec des entités situées dans des États ou territoires à fiscalité privilégiée (ETFP). Son champ d’application est vaste et ses conséquences, souvent drastiques.
Il ne se contente pas de limiter la déductibilité de certaines charges.
Il agit comme un véritable déclencheur pour d’autres mécanismes anti-abus, tels que le régime des sociétés étrangères contrôlées (article 209 B du CGI) ou l’imposition des revenus de structures offshore détenues par des personnes physiques (article 123 bis du CGI). L’objet du présent article est de vous permettre de comprendre les enjeux de ce dispositif central.
Nous aborderons sa complexité à travers une analyse en trois temps, en nous appuyant sur la législation et les éclairages décisifs apportés par la jurisprudence du Conseil d’État.
Pour cela, nous commencerons par définir la notion même de régime fiscal privilégié, une notion en apparence mathématique mais dont l’appréciation est devenue une affaire d’analyse fine et concrète.
Nous présenterons ensuite le régime juridique applicable, c’est-à-dire les conséquences directes et indirectes qui découlent de l’application de l’article 238 A.
Enfin, nous nous attarderons sur la question cruciale de la preuve, en décrivant la dialectique subtile qui s’opère entre l’administration fiscale et le contribuable, une dynamique profondément remaniée par la jurisprudence récente.
L’article 238 A et la notion de régime fiscal privilégié : au-delà de la simple comparaison de taux
Au cœur de l’article 238 A du CGI se trouve la définition de ce qu’est un « régime fiscal privilégié ».
Si le texte semble poser un critère purement arithmétique, la jurisprudence a considérablement enrichi et complexifié son interprétation, exigeant une analyse bien plus approfondie.
L’article 238 A et sa définition légale : une comparaison mathématique en apparence simple
Le deuxième alinéa de l’article 238 A du CGI pose le principe :
« Les personnes sont regardées comme soumises à un régime fiscal privilégié dans l’Etat ou le territoire considéré si elles n’y sont pas imposables ou si elles y sont assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus dont le montant est inférieur de 40 % ou plus à celui de l’impôt sur les bénéfices ou sur les revenus dont elles auraient été redevables dans les conditions de droit commun en France, si elles y avaient été domiciliées ou établies. »
Ce seuil, fixé à 40 % depuis le 1er janvier 2020 (il était de 50 % auparavant pour tenir compte de la baisse progressive du taux de l’IS en France), implique une démarche en deux temps :
- Déterminer l’impôt français théorique: Il faut reconstituer l’assiette imposable de l’entité étrangère selon les règles du droit fiscal français (règles d’assiette, déductions, etc.) et lui appliquer le taux d’impôt sur les sociétés (IS) français de droit commun.
- Comparer avec l’impôt réellement acquitté à l’étranger: On compare ensuite cet impôt français théorique avec l’impôt sur les bénéfices ou les revenus effectivement supporté par l’entité dans son pays de résidence.
Si l’impôt étranger est inférieur de 40 % ou plus à l’impôt français théorique, le régime est qualifié de « privilégié ». Cette définition s’applique tant aux personnes morales qu’aux personnes physiques.
La notion d’État à fiscalité privilégiée : précisée et complexifiée par la jurisprudence
Le Conseil d’État a rapidement établi que la simple comparaison des taux nominaux d’imposition était insuffisante et pouvait conduire à des conclusions erronées.
Il a donc imposé une analyse bien plus rigoureuse.
L’exigence d’une comparaison in concreto et globale
Depuis l’arrêt de principe SA Auriège (CE, 21 mars 1986, n° 53002), le juge de l’impôt exige une comparaison in concreto.
Cela a été constamment réaffirmé depuis, notamment dans les décisions Société Control Union Inspections France (CUIF) (CE, 24 avril 2019, n° 413129).
Dans la décision SA Auriège, les juges affirment que :
« Considérant que l’administration invoque les dispositions précitées de l’article 238-A pour refuser à la société “Auriège” le droit à déduction de ses résultats des sommes […] ; que si elle fait état de divers documents […], ces documents [dont un « rapport annuel sur la charge fiscal en Suisse »] sont toutefois insuffisants pour permettre au Conseil d’Etat d’apprécier si la société […] est soumise, dans le canton de Genève, à un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238-A précité du code général des impôts »
Cela signifie que l’administration ne peut se contenter de mettre en avant un taux d’IS étranger faible. Elle doit procéder à une analyse globale et circonstanciée du système fiscal étranger, en tenant compte de l’ensemble des modalités d’imposition :
- Les règles d’assiette : amortissements, provisions, report des déficits, etc.
- L’ensemble des impôts directs sur les bénéfices et les revenus, et non uniquement l’équivalent de l’impôt sur les sociétés (CE ; 29 juin 2020 ; n°433937).
« Pour l’application de ces dispositions, la charge de la preuve de ce que le bénéficiaire des rémunérations en cause est soumis à un régime fiscal privilégié incombe à l’administration. Il lui appartient à cet égard d’apporter tous éléments circonstanciés non seulement sur le taux d’imposition, mais sur l’ensemble des modalités selon lesquelles des activités du type de celles qu’exerce ce bénéficiaire sont imposées dans le pays où il est domicilié ou établi. »
Par exemple, la seule circonstance qu’un État (comme Hong Kong) applique un principe de territorialité stricte, n’imposant pas les revenus de source étrangère, ne suffit pas à caractériser un régime fiscal privilégié dès lors que l’activité concernée aurait également été exonérée en France en vertu de nos propres règles de territorialité (CE, 24 avril 2019, n° 412284, Sté Gemar Lumitec) :
« Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour retenir le caractère privilégié, au sens des dispositions précitées, du régime fiscal applicable au cas d’espèce, la Cour s’est fondée sur l’absence de contestation des indications données par l’administration, selon lesquelles les revenus provenant d’activités réalisées en dehors de du territoire de Hong Kong n’y sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés. Elle a ainsi méconnu la règle mentionnée au point 3 et commis une erreur de droit. »
Il y a donc une possibilité pour le contribuable de se défendre face à l’administration fiscale en prouvant l’absence de caractère privilégié dans le pays concerné.
Le cas des entités transparentes (partnerships) : l’apport de la méthode de l’équivalence juridique
Une question inédite s’est posée : une entité fiscalement transparente (de type partnership), qui n’est pas elle-même redevable de l’impôt, peut-elle être considérée comme bénéficiant d’un régime fiscal privilégié ?
La Cour administrative d’appel de Versailles, dans un arrêt Sté Rexel SA (CAA Versailles, 5 mars 2019, n° 16VE02168), a répondu par l’affirmative en appliquant la « méthode de l’équivalence juridique », consacrée par le Conseil d’État dans l’affaire Artémis (CE, 24 nov. 2014, n° 363556) :
« Considérant que la cour administrative d’appel a relevé, d’une part, qu’il n’était pas contesté que le ” general partnership ” Artemis America n’était pas soumis aux Etats-Unis à un régime de sociétés de capitaux et, d’autre part, qu’en application du droit de l’Etat du Delaware, il était doté d’une personnalité juridique distincte de celle de ses associés ; qu’elle a jugé qu’ainsi, le ” general partnership ” Artemis America devait être assimilé à une société de personnes régie par l’article 8 du code général des impôts, dont les associés sont personnellement imposés pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société ; qu’elle en a déduit qu’en raison de l’interposition du ” general partnership ” Artemis America, la société Artémis SA ne pouvait pas faire application du régime fiscal des sociétés mères à la quote-part de ses bénéfices correspondant aux dividendes distribués par la société Roland au ” general partnership ” Artemis America ; qu’en statuant ainsi et, notamment, en ne tenant pas compte, pour la détermination du régime fiscal applicable aux bénéfices perçus par la société Artémis SA, de ce que le ” general partnership ” Artemis America obéit, au regard du droit fiscal de l’Etat du Delaware, à un régime de transparence, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit ; »
Le raisonnement est le suivant :
- Qualification juridique : On assimile l’entité étrangère à la structure juridique française la plus proche. En l’espèce, un limited partnership américain a été assimilé à une société en commandite simple (SCS) française.
- Comparaison des régimes fiscaux : On compare le traitement fiscal de l’entité étrangère à celui de son équivalent français. Une SCS française est soumise à l’IS sur la part des bénéfices revenant à ses associés commanditaires (qui ont une responsabilité limitée). Or, le limited partnership américain était, lui, intégralement transparent, donc non imposé à son niveau.
- Conclusion : Cette divergence de traitement (non-imposition aux États-Unis alors que l’équivalent français aurait été partiellement imposé) suffit à caractériser un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238 A du CGI, car l’entité est “non imposable” là où son équivalent français l’aurait été.
Distinction entre les États et Territoires à Fiscalité Privilégiée et États et Territoires Non Coopératifs
Il est crucial de ne pas confondre les ETFP avec les ETNC, listés à l’article 238-0 A du CGI. Cette liste, mise à jour régulièrement par arrêté ministériel, vise les juridictions qui ne respectent pas les standards internationaux de transparence et d’échange d’informations.
La distinction est fondamentale : pour un paiement vers une entité dans un ETNC, le troisième alinéa de l’article 238 A du CGI instaure une présomption irréfragable de régime fiscal privilégié.
L’administration est alors dispensée d’apporter la preuve de la faible imposition.
Les conséquences sont également beaucoup plus sévères (retenue à la source de 75 % sur certains revenus, exclusion du régime mère-fille, etc.).
États et Territoires à Fiscalité Privilégiée et régime fiscal : portée et conséquences de la qualification
Une fois la qualification de régime fiscal privilégié établie, l’article 238 A du CGI déploie ses effets, qui vont bien au-delà d’une simple question de déductibilité.
Le mécanisme principal : la limitation de la déductibilité des charges
La doctrine de l’administration affirme que :
« Deux types d’opérations peuvent entraîner la mise en œuvre des dispositions de l’article 238 A du CGI :
- d’une part, certaines charges payées ou dues à des personnes domiciliées ou établies dans un État étranger ou un territoire situé hors de France et qui y sont soumises à un régime fiscal privilégié (cf. n° 10) ;
- d’autre part, les versements effectués sur un compte tenu dans un organisme financier établi dans un pays à fiscalité privilégiée (cf. n° 270). » – BOI-BIC-CHG-80-10
Le premier alinéa de l’article vise spécifiquement certaines charges :
- Les intérêts, arrérages et autres produits d’obligations, créances, dépôts et cautionnements
- Les redevances de concession de licences, brevets, marques, procédés de fabrication.
- Les rémunérations de services.
Cependant certains régimes spéciaux existent écartant l’application de l’article 238 A du CGI :
« Il ressort toutefois de l’exposé des motifs du projet de loi voté par le Parlement que le texte ne concerne pas les intérêts, arrérages et autres produits des obligations émises avec le bénéfice des régimes spéciaux prévus à l’article 131 ter du CGI » – Point 30 BOI-BIC-CHG-80-10
Le principe est un renversement de la charge de la preuve. Ces dépenses, payées à une personne dans un ETFP, sont présumées non déductibles.
De plus, le contribuable peut écarter cette présomption en apportant une double preuve (la « clause de sauvegarde ») :
- Que les dépenses correspondent à des opérations réelles
- Qu’elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré
En effet, l’alinéa 3 de l’article 238 A du CGI dispose que :
« ne sont pas admis comme charges déductibles pour l’établissement de l’impôt, sauf si le débiteur apporte la preuve mentionnée au premier alinéa et démontre que les opérations auxquelles correspondent les dépenses ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces dépenses dans un Etat ou territoire non coopératif. »
Cette seconde condition renvoie directement à la théorie de l’acte anormal de gestion.
Le contribuable doit être en mesure de justifier que la rémunération versée correspond à la valeur de marché de la prestation reçue et que l’opération a été réalisée dans l’intérêt de l’entreprise française.
L’article 238 A et la notion de bénéficiaire effectif
Dans des montages complexes, une question peut se poser : si le bénéficiaire direct des sommes les reverse ensuite à une autre entité, faut-il analyser le régime fiscal de ce bénéficiaire final ?
Le Conseil d’État a répondu par la négative dans l’affaire Faraday (CE, 5 juin 2020, n° 426351).
L’analyse de l’article 238 A du CGI s’arrête au bénéficiaire direct des sommes payées ou dues :
« En premier lieu, pour écarter l’application des dispositions de l’article 238 A du code général des impôts aux sommes correspondant aux commissions proportionnelles au chiffre d’affaires de la société Faraday, la cour a relevé que ces sommes étaient, en vertu du contrat de prestations de services du 29 février 2012, destinées à rémunérer les guides et les agences de voyage apporteurs d’affaires et ne faisaient que transiter par la société Eagle Vantage Limited avant d’être remises aux intéressés, et en a déduit que cette société ne pouvait être regardée comme en étant le bénéficiaire. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 qu’en se fondant sur un tel motif, alors qu’il lui appartenait seulement de rechercher si le destinataire du paiement des rémunérations était domicilié ou établi dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et y était soumis à un régime fiscal privilégié, la cour a commis une erreur de droit. »
Il n’y a pas lieu de rechercher si ces sommes sont ensuite reversées.
Cette solution offre une sécurité juridique en évitant une analyse en « cascade » qui serait sans fin.
Le cas particulier des versements sur un compte bancaire de l’article 238 A
Le dernier alinéa de l’article 238 A étend le dispositif à « tout versement effectué sur un compte tenu dans un organisme financier établi dans un des Etats ou territoires visés ».
Cette disposition vise les schémas triangulaires : une entreprise française paie un prestataire situé dans un pays à fiscalité « normale », mais le paiement est effectué sur un compte bancaire dans un ETFP ou plus communément paradis fiscal.
Face à la rédaction laconique du texte, le Conseil d’État, dans l’affaire Sté Gemar Lumitec précitée, a dû construire un raisonnement pour donner un effet utile à cette disposition. Il a mis en place une double fiction :
- On fait l’hypothèse que le titulaire du compte (le prestataire taïwanais dans l’affaire) est établi dans l’État de la banque (Hong Kong).
- On fait l’hypothèse qu’il réalise son activité depuis cet État.
C’est sur la base de cette double fiction que l’on procède à la comparaison de charge fiscale avec la France.
Cette interprétation constructive évite que la règle soit neutralisée par les principes de territorialité de l’impôt :
« La cour n’a pas davantage commis d’erreur de droit en jugeant que l’administration avait appliqué à bon droit au montant ainsi déterminé, pour calculer l’imposition dont M. A… aurait été redevable à Hong Kong s’il y avait exercé son activité, le taux moyen d’imposition résultant, en fonction de ces sommes, de l’application du barème prévu par le système d’imposition personnalisé en vigueur à Hong Kong. »
Le cas particulier des versements sur un compte bancaire de l’article 238 A. L’effet “déclencheur” de l’article 238 A : l’articulation avec les autres dispositifs anti-évasion
La qualification d’un régime de « privilégié » au sens de l’article 238 A du CGI est une condition d’application de plusieurs autres dispositifs majeurs de la fiscalité internationale française.
- L’article 209 B du CGI sur lequel nous avons fait un article (Régime des sociétés étrangères contrôlées – CFC) : Lorsqu’une société française passible de l’IS détient, directement ou indirectement, plus de 50 % des parts d’une entité située dans un ETFP, les bénéfices de cette dernière sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers imposable en France, qu’ils soient distribués ou non.
Le taux de détention mentionné à l’alinéa précédent est ramené à 5 % lorsque plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote de l’entité juridique établie ou constituée hors de France sont détenus par des entreprises établies en France qui, dans le cas où l’entité étrangère est cotée sur un marché réglementé, agissent de concert ou bien par des entreprises qui sont placées directement ou indirectement dans une situation de contrôle ou de dépendance au sens de l’article 57 à l’égard de la personne morale établie en France.
- L’article 123 bis du CGI sur lequel nous avons aussi fait un article (pour les personnes physiques) : Un mécanisme similaire s’applique aux personnes physiques domiciliées en France qui détiennent au moins 10 % des parts d’une entité dans un ETFP, dont l’actif est principalement financier. Les revenus de cette entité sont imposés en France entre les mains de la personne physique.
- Autres conséquences : La qualification d’ETFP peut également entraîner l’application de retenues à la source majorées ou l’exclusion de certains régimes de faveur, notamment lorsque l’ETFP est également un ETNC.
Une problématique explorée dans cet article [intégrer un lien hypertexte].
Les États et Territoires à Fiscalité Privilégiée et la question de la preuve
La question de la preuve est centrale et a été au cœur des évolutions jurisprudentielles récentes. Le dialogue entre l’administration et le contribuable suit des règles précises.
La charge initiale pèse sur l’administration fiscale
C’est le principal enseignement des arrêts récents du Conseil d’État.
Il appartient à l’administration d’apporter la preuve que le bénéficiaire des sommes est soumis à un régime fiscal privilégié.
Comme nous l’avons vu, cette preuve ne peut être une simple affirmation basée sur un taux d’imposition.
L’administration doit fournir au juge (et au contribuable) des éléments circonstanciés et précis sur le régime fiscal étranger applicable à une activité du type de celle exercée par le bénéficiaire.
Elle doit mener une analyse in concreto et globale, en s’appuyant sur les textes fiscaux étrangers, les conventions fiscales et les outils d’échange d’informations à sa disposition.
C’est une charge probatoire lourde qui est très favorable au contribuable.
Les États et Territoires à Fiscalité Privilégiée et la charge de la preuve
Si, et seulement si, l’administration est réputée avoir apporté cette preuve, la charge est renversée. Le contribuable dispose alors de deux lignes de défense successives :
Contester la qualification d’ETFP : Le contribuable peut, en réponse, apporter ses propres éléments pour démontrer que l’analyse de l’administration est erronée ou incomplète.
Il peut, par exemple, mettre en lumière des règles d’assiette ou d’autres impôts que l’administration aurait omis, et qui démontrent que le différentiel de 40 % n’est pas atteint.
Invoquer la clause de sauvegarde : Même si le caractère privilégié du régime est avéré, le contribuable peut toujours obtenir la déduction de sa charge en prouvant, comme mentionné plus haut, que l’opération est réelle et ne présente pas un caractère anormal ou exagéré.
La défense se déplace alors sur le terrain de la justification économique et commerciale de la transaction.
Conclusion
Loin d’être une simple règle technique, l’article 238 A du CGI est un dispositif complexe au carrefour du droit fiscal, du droit des sociétés et des principes de preuve.
Sa définition du régime fiscal privilégié, affinée par une jurisprudence exigeante, a transformé une simple comparaison arithmétique en une analyse économique et juridique approfondie.
Les évolutions récentes ont renforcé les droits du contribuable en imposant à l’administration une charge probatoire rigoureuse, l’obligeant à justifier ses redressements de manière détaillée.
Néanmoins, la puissance du dispositif demeure, tant par son effet direct sur la déductibilité des charges que par son rôle de porte d’entrée vers d’autres mécanismes anti-évasion redoutables. La navigation dans les eaux de la fiscalité internationale, et notamment dans les transactions avec des partenaires étrangers, exige une vigilance extrême et une documentation sans faille.
Face à la complexité de ces règles et à la sévérité de leurs conséquences, le recours à un avocat spécialiste du droit fiscal est non seulement recommandé, mais souvent indispensable pour sécuriser les opérations et, le cas échéant, construire une défense solide face à l’administration.
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