La procédure d’office et la procédure contradictoire obéissent à deux grands corps de règles bien distincts. Votre avocat fiscaliste vous explique les différences.
Vous avez fait l’objet d’un redressement fiscal. Vous avez des raisons de penser que ce redressement n’est pas justifié, et vous souhaitez le contester.
Or, la contestation de la proposition de rectification peut obéir à au moins deux types de règles différentes :
- La procédure de rectification contradictoire ;
- La procédure d’office.
Ces deux corps de règles ne concernent pas la phase d’investigation, qui s’achève en principe par l’envoi d’une proposition de rectification.
Ils concernent uniquement la proposition de rectification elle-même et ses suites, jusqu’à la « mise en recouvrement ».
Dans notre jargon de fiscaliste, on distingue donc bien entre :
- La « procédure de vérification », qui s’achève avec la proposition de rectification ou la notification des bases d’imposition.
- La «procédure de rectification », qui commence avec la proposition de rectification ou la notification des bases d’imposition et s’achève avec la mise en recouvrement.
Procédure d’office & procédure contradictoire : logique de la distinction
La procédure contradictoire est la procédure normale et habituelle
Quand l’administration fiscale vous adresse une proposition de rectification, le redressement s’inscrit, en principe, dans le cadre de la procédure contradictoire.
Celle-ci vous fait bénéficier de diverses garanties.
Parmi celles-ci, il convient de nommer :
- La possibilité de présenter vos observations,
- L’obligation pour le service des impôts de répondre à vos observations,
- Le droit de vous faire assister d’un conseil pour discuter la proposition de rectification,
- L’intervention éventuelle d’une commission.
L’objet d’une telle procédure est de vous permettre de faire valoir vos observations et d’opposer une contradiction à l’agent des impôts en charge du contrôle.
Les procédures d’office : des procédures d’exception
A l’inverse, les procédures dites « d’office » constituent des procédures d’exception.
Elles sont en générales prévues par un texte et sanctionnent un comportement que l’administration considère comme un manquement de votre part.
Les principaux cas d’imposition d’office
Il peut s’agir par exemple :
- D’un défaut ou d’un retard dans le dépôt de vos déclarations fiscales.
- D’une absence ou d’un retard de réponse à une demande d’éclaircissements ou de justifications (cf. mon article sur le sujet).
- D’une absence de justification dans les délais légaux de justification de l’origine et des modalités d’acquisition d’avoirs à l’étranger.
- Du défaut de désignation en France d’un représentant fiscal prévu par la loi
Imposition d’office : logique du système
Dans toutes ces hypothèses, l’administration fiscale considère en quelque sorte que vous vous êtes vous-même placé en situation de rupture de dialogue avec elle.
Il en découle alors une implacable sanction : l’administration fiscale, elle non plus, ne dialoguera pas avec vous pour vous redresser.
Des moyens de défense existent, mais ils sont alors beaucoup plus limités.
Dans le cadre de telles procédures, ma stratégie consiste souvent :
- Soit à vous défendre sur le fond du dossier.
- Soit à démontrer que les conditions de l’imposition d’office ne sont pas réunies.
Procédure d’office, procédure contradictoire & indication du droit à un avocat
En principe, la proposition de rectification que vous avez reçue mentionne le fait que vous pouvez être assisté du conseil de votre choix.
Cette obligation découle directement des dispositions de la loi (article L54 B du livre des procédures fiscales).
L’absence d’une telle mention entraîne la nullité de la procédure de rectification.
Néanmoins, cette mention n’est pas obligatoire dans le cadre des procédures d’office (CE 4 avril 1997 n° 160035). Cela ne signifie pas que vous n’ayez pas le droit d’être assisté par un avocat spécialisé en droit fiscal. Mais l’administration fiscale n’a pas l’obligation de vous le signaler.
Procédure d’office & procédure contradictoire et intervention de la commission
Dans certaines circonstances, la notification des redressements vous donne ensuite la possibilité de saisir une commission, chargée de donner un avis indépendant de celui du service vérificateur.
Tel est notamment le cas de :
- La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires ;
- La commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires ;
- La commission départementale de conciliation.
En général, ces commissions interviennent pour donner un avis sur des questions de fait.
Elles peuvent être un véritable atout pour faire renoncer le fisc aux redressements.
Néanmoins, l’accès à ces commissions n’est en principe pas ouvert dans les procédures d’évaluation d’office.
Par exception, l’accès à la commission des impôts directs et taxes sur le chiffre d’affaires est parfois ouvert suite à un examen de situation fiscale personnelle. Tel est le cas lorsque vous avez été taxé d’office suite à une demande d’éclaircissements ou de justifications.
Procédure contradictoire, procédure d’office & prorogation du délai de trente jours
Lorsqu’une proposition de rectification vous est adressée, vous disposez en principe d’un délai de trente jours pour faire valoir vos observations.
Néanmoins, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, ce délai peut être prorogé de trente jours supplémentaires.
Il est nécessaire que vous en fassiez la demande expresse avant l’expiration du délai de trente jours.
Dans les procédures d’office, cette prorogation du délai de trente jours n’est pas ouverte.
Procédure d’office, procédure contradictoire & information préalable du contribuable
Sauf cas très particulier, même en cas d’imposition d’office, l’administration fiscale doit vous informer des bases d’imposition retenues avant la mise en recouvrement des redressements.
Vous pouvez alors faire part à l’administration de vos observations.
En procédure contradictoire, l’administration est tenue d’y répondre de façon motivée. A défaut, la procédure est viciée.
A l’inverse, en procédure d’office, l’administration n’est pas tenue de répondre à vos observations.
Je recommande toutefois d’adresser des observations à l’administration, y compris en procédure d’office. En pratique, celles-ci sont lues et étudiées. Le cas échéant, je complète ces observations par un contact téléphonique avec le service vérificateur. Ces contacts permettent souvent de prendre le pouls de l’administration pour mieux sentir sa position, et de mettre en avant les éléments de défense les plus décisifs.
Procédure d’office, procédure contradictoire & recours hiérarchique
La plupart des procédures contradictoires ouvrent droit à un recours hiérarchique.
Il est ouvert sur le fondement de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié dans le cadre des procédures de contrôle approfondies :
- Vérification de comptabilité,
Il est ouvert sur le fondement de l’article L.54 C du livre des procédures fiscales dans les autres cas.
En revanche, aucun recours hiérarchique n’est prévu dans le cadre des procédures dites d’office.
Je vous donne tous les détails sur le recours hiérarchique dans mon article dédié.
Procédure d’office & procédure contradictoire : une contestation toujours possible
Vous l’avez compris, les possibilités de contester les redressements sont nettement plus variées dans le cadre d’une procédure contradictoire.
Néanmoins, ces limitations propres à la procédure d’office ne concernent que la phase de rectification.
Une fois celle-ci achevée, vous retrouvez l’accès aux procédures de droit commun à égalité avec les contribuables imposés selon la procédure contradictoire.
Notamment, vous pouvez déposer une réclamation contentieuse, et contester l’intégralité des redressements pour des motifs de fond.
Cette réclamation contentieuse peut être assortie d’une demande de sursis de paiement.
Si l’administration fiscale persiste dans sa position, vous pourrez saisir le tribunal compétent.
Procédure d’office, procédure contradictoire & pénalités fiscales
L’administration fiscale a parfois tendance à appliquer systématiquement des pénalités pour manquement délibéré lorsqu’elle utilise une procédure d’imposition d’office.
Or, il n’y a pas de corrélation automatique entre le type de procédure utilisé et l’application de pénalités.
Si l’administration fiscale vous applique des pénalités, elle doit apporter la preuve du manquement les justifiant.
Pour en savoir plus sur les pénalités fiscales, consultez mes articles dédiés :
- Majorations de 40% pour manquement délibéré : comment réagir ?
Rectification d’office et rectification contradictoire : quelle influence sur les stratégies de défense ?
Dès les premiers échanges avec l’administration fiscale, il est d’abord impératif de tout faire pour éviter de vous retrouver en situation d’imposition d’office.
Sans entrer ici dans tous les cas d’imposition d’office, vous devriez en principe réussir à éviter une telle procédure si :
- Vous répondez à tous les courriers de l’administration ;
- Vous déposez vos déclarations fiscales dans les délais prévus par la loi ;
- Vous ne vous placez pas dans une situation d’opposition à contrôle fiscal.
Dans les situations complexes, une partie de l’art de l’avocat fiscaliste consiste à être suffisamment coopératif pour éviter l’imposition d’office, et suffisamment évasif pour ne pas donner d’informations sensibles au vérificateur.
Une fois que le mal est fait, la situation n’est pas perdue pour autant !
Il arrive que l’administration applique parfois indûment une procédure d’office. Ce vice de procédure doit alors être soulevé et permet en principe de remettre en cause les redressements. Attention toutefois à ne pas le soulever trop tôt. Il convient en effet d’attendre que l’administration fiscale soit « hors délai » pour régulariser la situation.
Enfin, la défense sur le fond du dossier dépend des circonstances particulières de celui-ci. Il faut alors se plonger dans le détail des textes et de la jurisprudence applicable. C’est mon métier.
Lorsque le dossier est vraiment mauvais – ce qui arrive – la négociation d’une transaction est parfois la moins mauvaise des solutions.
Dans tous les cas, n’hésitez pas à consulter mon article de synthèse qui vous explique comment contester un redressement fiscal.
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